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ZIZANIE :  nom féminin
                         Discorde, désunion, mésintelligence
                         Semer la zizanie (entre des personnes, dans un groupe), faire naître la discorde, les disputes



                        
La Zizanie :  l'une des c
auses principales de la disparition de Radio Solaris...


Interview réalisée fin mars 1999, quelques jours après la fin des émissions de la station temporaire Yvetot FM.
Quand on rencontre Pierre, il est très difficile de le faire parler de ses six années passées à Radio Solaris qu'il préfère oublier. Néanmoins, il a accepté de répondre à quelques-unes de nos questions à propos de cette ambiance saumâtre qui régnait au sein de l'équipe, au moment de son départ "forcé" de la station.


(Fait exceptionnel : il s'agit pour notre site  du  seul  et  unique  témoignage  "côté coulisses" que nous avons recueilli à ce jour, de la part d'un DJ salarié de Solaris)   NdW

Pierre - Radio Solaris

  Pierre, animateur & chef des programmes 
 
(de novembre 1981 à septembre 1987)


 Le malaise ambiant dans l’équipe

 vu de l’intérieur de Solaris

 

> Par délicatesse, nous avons modifié les initiales de prénoms des amis mis en cause... S'ils sont futés, ils se reconnaîtront !   ;-)


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JC > Pierre, à propos du départ soudain de Bruno Gilbert de l'antenne en juin 1986, on nous a dit que la nouvelle politique de programmes adoptée quelques jours auparavant, a été la raison officielle de son départ de Radio Solaris. Mais n'est-ce pas plutôt le départ simultané de Philippe Thomas (son complice de toujours) qui en est la cause ? Peux-tu nous en dire plus sur le départ brutal de Bruno ?


Pierre > En ce qui concerne Bruno, s’il est parti, c’est parce qu’à l’époque, il sortait avec R... qui avait été embauchée pour un emploi d'animatrice comme TUC (emploi/stage d'une durée fixée à 6 mois) et parvenue à la fin de son contrat, elle n’avait pas été embauchée, faute de trésorerie (c'est du moins l'excuse officielle qui a été donnée). Elle partant, Bruno m’avait dit qu’il fallait le comprendre mais qu’il ne pouvait pas faire autrement que de la suivre… C’est donc la raison de son départ.


JC > A propos de Christian H… que j'ai considéré (à tort ?) comme "un nouveau venu" dans l'Histoire, qui était-il ? On sait juste qu'il avait été accueilli fraîchement parmi nous avec ses idées réformatrices ? Rappelle-toi l'intervention tonitruante de Didier lors de la présentation de cette campagne de promotion "Privilège" à laquelle personne dans l'assistance n'avait rien compris ! (l'épisode est raconté dans L'histoire  puis aller au § 1986 )


Pierre > Christian n'était pas un nouveau venu car il faisait déjà des émissions le dimanche soir et ensuite le mercredi matin, une émission pour les enfants qu’il enregistrait dans le studio 2, ça faisait un bail qu’il était là.
Lui, il était chargé des "événements" de la radio - les campagnes de promotion, les publicités et autres moyens - juste après le départ de Thomas
(Philippe Thomas - NdW). Il s’occupait du commercial, de la promo. C’est vrai qu’il avait de grandes idées. C’est lui qui avait lancé cette carte « Privilège » entre autres pour attirer et fidéliser les annonceurs et auditeurs. Et ça a marché. (...)

Et puis, il y a eu ces histoires avec
S...
(d'abord animatrice et ensuite elle est passée secrétaire). Elle n’aimait pas Christian. C'était sûrement à cause de "sa grande gueule" ? (sic) D'ailleurs, elle en voulait à moi et autant à lui, surtout qu'il lui reprochait personnellement de ne pas chercher à "rentabiliser son emploi"... (pas compris... mais de quoi je me mêle ? - NdW)


JC > Les nouvelles règles de programmes ont été imposées, adoption du format Top 40, avec en parallèle ces fameuses fiches SACEM à remplir... Tout cela a été de nouvelles sources de mécontentement général que l’on a ressenti dans les couloirs de la station.


Pierre > Au niveau des programmes, j'ai lancé cette grille de programmes en la canalisant pendant la journée (style musical prédéfini à respecter pendant la journée) et la laissant libre ou plus souple le soir et le week-end. La semaine était prise en charge par les animateurs "permanents" - donc rémunérés - qui devaient respecter les consignes édictées par les administrateurs de l’association Solaris. Le soir et le week-end étaient réservés aux bénévoles et je ne crois pas qu’on ait censuré Thomas ou toi-même dans vos choix musicaux. (…)


JC > Néanmoins, certains animateurs y ont vu une attaque personnelle, contre eux et leur propre choix de chanteurs notamment français à l'antenne, sans oublier les autres qui voulaient continuer à passer du jazz et de la musique classique, (incongrus sur une radio au format Top 40 !) ceux-là ont ressenti des contraintes inacceptables et sont partis !



Pierre > Pour les nouvelles règles de programmes, ce n’est pas spécialement contre les chansons françaises qu’on en voulait mais surtout aux animateurs qui passaient du funky, entre autres, en plein après-midi sans vraiment se soucier de la catégorie d'auditeurs qui était à l’écoute pendant ces heures-là.

Bon c’est vrai, personnellement je n’aimais pas le classique ni le jazz
(…) Mais sérieusement, il fallait empêcher un animateur de ne passer que les disques qu’il aime ou encore d'éviter d'entendre dix fois le même tube dans la journée. Il fallait obtenir des programmes cohérents qui correspondaient le plus possible aux goûts des auditeurs.
On avait établi un code de couleurs correspondant à chaque type de musique.
(vignettes colorées apposées sur les pochettes de disques et albums). L’animateur était donc libre de choisir le disque qu’il désirait passer parmi tous ceux classés dans la couleur du code convenu.

Nous, on travaillait pour les auditeurs et non pour copier RVS
(allusion à quelques animateurs Solaris en mal d'inspiration - NdW) comme l'aurait voulu N... toujours prompt à tout critiquer. Ni pour favoriser tel ou tel animateur, comme ce cher Z... bien plus préoccupé à assurer son image plutôt que celle de la radio dont il se servait. D’ailleurs les propos tenus il y a quelques jours sur Yvetot FM le prouvent, puisqu’il se dit à l’origine de Solaris ! Je l’ai entendu…  (discussions au micro de Yvetot FM !)


JC > En 1986 ou 87 (?)  quand on a vu apparaître chez nous Philippe Lecointre (NRJ Le Havre), on a discuté entre animateurs, de la menace d'adopter sur l'antenne de Solaris, le "style NRJ" dans la présentation et l'animation : voix uniformes au ton forcé, playlistes raccourcies et imposées, etc... pour reproduire ce que faisaient déjà des radios à Rouen et alentours. Pouvait-on craindre à cet instant, comme cela a été tristement le cas dans d'autres régions, que notre station puisse se dévaloriser à son tour en "NRJ bis" à Yvetot, qu'elle perde ainsi le contact qui l'unissait à ses auditeurs immédiats et forcément son âme de radio libre ?


Pierre > Oui, effectivement. Un jour les programmes ont failli changer car le Conseil d’administration (sans aucune concertation, comme d'habitude - NdW) nous a imposé ce type venu du Havre, de « Radio Cap de la Hève » - disparue et reprise par NRJ justement ! Personne ne le connaissait (1) et il a tenté d'imposer chez nous une programmation "titre par titre". Là j’avoue, j’ai été contre, les programmes devenaient de plus en plus stéréotypés et ressemblaient à une "sous-RVS" (à NRJ plutôt ?). Mais nous les permanents, on n’y était pour rien.

(1) Là ce n'est pas exact car Philippe Lecointre était connu de la direction et des membres de l'association France Radio Club encore présents à Solaris. C'est d'ailleurs lui que l'on aperçoit en 1982 et auquel nous devons la vidéo > "Radio Cap de la Hève chez Radio Solaris" à revoir ici : http://youtu.be/XHfm_JWMOX4       (pour info : Radio Cap de la Hève est devenue simple relais de NRJ dans le courant de l'année 1984)


JC > Avec le temps, ça fait onze ans que Solaris a disparu, tu regrettes quoi aujourd'hui ?
(avril 1999)


Pierre > La radio était devenue une véritable entreprise qui ne ressemblait plus du tout à l’association de bénévoles que l'on avait connue au départ en 1981. Hélas si des types comme N... n’avait pas monté le bourrichon à certains et certaines, c'est sûr, on aurait pu continuer.
Se taper presque 14 heures de boulot par jour, ça use un peu, même un passionné de radio et si de plus, on est constamment critiqué toujours par les mêmes, ou si  les employé(e)s décident eux (elles)-mêmes de modifier leurs horaires de programmes pour pouvoir se lever plus tard...
  (gros soupir !)

[ Ahurissante révélation de Pierre : assurer l'antenne dès 6 h 00 tôt le matin pour certain(e)s semblait une corvée insurmontable. Quelle solidarité ! Voilà qui ne manquera pas 30 ans après, de faire rugir les jeunes générations sans emploi et ceux qui indirectement déploreront l'absence d'une radio à écouter à Yvetot ! ]   NdW


JC > Peux-tu nous dire encore quelques mots à propos d’Yvetot FM, la radio temporaire qui vient de cesser d'émettre de la Médiathèque après une quinzaine de jours, du 27 février au 14 mars 1999 ? As-tu écouté les émissions et y as-tu entendu des paroles prononcées qui te révoltent ?


Pierre > Oui évidemment. Quand j’entends dix ans plus tard sur Yvetot FM, des « animateurs » se gargariser de souvenirs en oubliant de préciser que Solaris a été une bonne pompe à fric pour leurs propres économies (peut-on dire "à des fins d'enrichissement personnel" ?), excuse-moi, les fossoyeurs de Solaris ne sont pas ceux que l’on croie.

De plus, à propos du Podium Solaris, il me semble me rappeler que l’on nous avait reprochés à François M.
(chargé du démarchage publicitaire) et à moi, d’avoir mis sur pied une opération qui coûtait plus cher qu’elle n'allait rapporter, chose que je n’ai pas réentendue évoquer sur Yvetot FM lorsque Daniel Lefebvre (Président de Solaris à l'époque) en a parlé. (...)

Il y a un écart entre une personne qui vient tous les week-ends et n'entend qu'un seul son de cloche et une autre qui y travaille tous les jours. Crois qui tu veux mais moi, je sais ce que j’ai vu et entendu !



JC > Puisque la dernière remarque de Pierre me concerne manifestement, j'affirme une fois de plus
que je ne crois et ne juge personne sur la foi d'une quelconque rumeur (qui n'ont d'ailleurs jamais manqué !).

Dans
"L'histoire d'une Radio libre...", j'ai décrit ce que j'ai vu, entendu et perçu à l'écoute des programmes, comme l'aurait fait n'importe quel auditeur, ou ce que j'ai vécu en venant à Yvetot, avant de prendre place devant le micro avec enthousiasme évidemment. Mais je suis d'accord : un bénévole a tendance à idéaliser sa participation aux actions de son association. 

Pour les faits déroulés hors de ma présence, je ne peux qu'inciter chacun et chacune à réagir (ou rectifier) les propos rapportés dans ce site (ou le livre) et fournir les autres "sons de cloche", s'ils le veulent
*. Quoique après tant d'années passées... qui ne dit mot consent. Pour cette raison, on ne doit pas être si loin de la vérité.


*
adresse mail :  radiosolaris@free.fr

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Conclusion : si les multiples tracas
ont précipité la fin de la radio en juin 1988 (détournements de fonds, partenariat avec Cumulus Fécamp "pipé", abus de biens sociaux, litiges avec l'Administration publique), pas de mystère, l
a zizanie non-stop au sein de l'association est bien la première cause de disparition de Radio Solaris. 

JC Dumenil  
(membre de l'association Solaris et animateur bénévole RS)