96
          
"La Zizanie :  l'une des c
auses de la disparition de Radio Solaris"

               ou encore  "Le malaise ambiant vu de l’intérieur de Solaris"




       
ZIZANIE :
  nom féminin
                                   Discorde, désunion, mésintelligence
                                   Semer la zizanie (entre des personnes, dans un groupe), faire naître la discorde, les disputes


      Interview de Pierre, animateur et responsable des programmes sur Radio Solaris
                                                                                 (de novembre 1981 à septembre 1987)

Pierre - Radio SolarisQuand on rencontre Pierre aujourd'hui, il est très difficile de le faire parler de ses six années passées à Radio Solaris qu'il préfère oublier.
Néanmoins, il a accepté de répondre à quelques-unes de nos questions à propos de cette ambiance saumâtre qui régnait dans les derniers temps au sein de l'équipe, jusqu'au moment de son départ "forcé" de la station en août/septembre 1987.
   (JC)

Rappel : la radio s'est éteinte le 30.06.1988

<  Pierre, DJ Radio Solaris  

Interview effectuée
fin mars 1999, juste après l'exposition Yvetot FM sur le thème de "La Radio" à la MJC d'Yvetot

              
JC > Pierre, à propos du départ soudain de Bruno Gilbert de l'antenne en juin 1986, on nous a dit que la nouvelle politique de programmes adoptée quelques jours auparavant, a été la raison officielle de son départ de Radio Solaris. Mais n'est-ce pas plutôt le départ simultané de Philippe Thomas - son complice de toujours - qui en est la cause ? Peux-tu nous en dire plus sur le départ brutal de Bruno ?

Pierre > En ce qui concerne Bruno, s’il est parti, c’est parce qu’à l’époque, il sortait avec V... qui avait été embauchée pour un emploi d'animatrice comme TUC (emploi/stage d'une durée fixée à 6 mois) et parvenue à la fin de son contrat, elle n’avait pas été embauchée, faute de trésorerie (c'est du moins l'excuse officielle qui a été donnée). Elle partant, Bruno m’avait dit qu’il fallait le comprendre mais qu’il ne pouvait pas faire autrement que de la suivre… C’est donc la raison de son départ.

JC > A propos de Christian H… que j'ai considéré (à tort ?) comme un "nouveau venu" dans l'Histoire, qui était-il ? On sait juste qu'il avait été accueilli fraîchement parmi nous avec ses idées réformatrices ? Rappelle-toi l'intervention tonitruante de Didier (le 18 avril 1986) lors de la présentation de cette campagne de promotion "Privilège" à laquelle personne dans l'assistance n'avait rien compris ! (l'épisode est raconté dans L'histoire - au § 1986 )

Pierre > Christian n'était pas un nouveau venu car il faisait déjà des émissions le dimanche soir et ensuite le mercredi matin, une émission pour les enfants qu’il enregistrait dans le studio 2, ça faisait un bail qu’il était là.
Lui, il était chargé des "événements" de la radio - les campagnes de promotion, les publicités et autres moyens - juste après le départ de Thomas
(Philippe Thomas - NdW). Il s’occupait du commercial, de la promo. C’est vrai qu’il avait de grandes idées. C’est lui qui avait lancé cette carte « Privilège » entre autres pour attirer et fidéliser les annonceurs et auditeurs. Et ça a marché. (...)
Et puis, il y a eu ces histoires avec
A...
(d'abord animatrice et ensuite elle est passée secrétaire). Elle n’aimait pas Christian. C'était sûrement à cause de "sa grande gueule" ? (sic) D'ailleurs, elle en voulait à moi et autant à lui, surtout qu'il lui reprochait personnellement de ne pas chercher à "rentabiliser son emploi"... (pas compris... mais de quoi je me mêle ? - NdW)

JC > Les nouvelles règles de programmes ont été imposées, adoption du format Top 40, avec en parallèle ces fameuses fiches SACEM à remplir... Tout cela a été de nouvelles sources de mécontentement général que l’on a ressenti dans les couloirs de la station.

Pierre > Au niveau des programmes, j'ai lancé cette grille de programmes en la canalisant pendant la journée (style musical prédéfini à respecter pendant la journée) et la laissant libre ou plus souple le soir et le week-end. La semaine était prise en charge par les animateurs "permanents" - donc rémunérés - qui devaient respecter les consignes édictées par les administrateurs de l’association Solaris. Le soir et le week-end étaient réservés aux bénévoles et je ne crois pas qu’on ait censuré Thomas ou toi-même dans vos choix musicaux. (…)

JC > Néanmoins, certains animateurs y ont vu une attaque personnelle contre eux et leur propre choix de chanteurs notamment français à l'antenne, sans oublier les autres qui voulaient continuer à passer du jazz ou de la musique classique, (incongrus sur une radio au format Top 40 !) ceux-là ont ressenti des contraintes inacceptables et sont partis !


Pierre > Pour les nouvelles règles de programmes, ce n’est pas spécialement contre les chansons françaises qu’on en voulait mais surtout aux animateurs qui passaient du funky - entre autres - en plein après-midi sans vraiment se soucier de la catégorie d'auditeurs qui était à l’écoute pendant ces heures-là.
Bon c’est vrai, personnellement je n’aimais pas le classique ni le jazz
(…) Mais sérieusement, il fallait empêcher un animateur de ne passer que les disques qu’il aime ou encore d'éviter d'entendre dix fois le même tube dans la journée. Il fallait obtenir des programmes cohérents qui correspondaient le plus possible aux goûts des auditeurs.
On avait établi un code de couleurs correspondant à chaque type de musique.
(vignettes colorées apposées sur les pochettes de disques et albums). L’animateur était donc libre de choisir le disque qu’il désirait passer parmi tous ceux classés dans la couleur du code convenu.
Nous, on travaillait pour les auditeurs et non pour copier RVS
comme l'aurait voulu D... toujours prompt à tout critiquer. (Pierre fait allusion à quelques animateurs Solaris en mal d'inspiration - NdW) Ni pour favoriser tel ou tel animateur, comme ce cher P... bien plus préoccupé à assurer son image plutôt que celle de la radio dont il se servait. D’ailleurs les propos tenus il y a quelques jours sur Yvetot FM le prouvent, puisqu’il se dit à l’origine de Solaris ! Je l’ai entendu…  (lors des discussions-débats au micro de Yvetot FM ! - Ndw)

JC > En 1986 (ou 1987 ?) quand on a vu apparaître chez nous Philippe Lecointre (ex-NRJ Le Havre), on a tout de suite redouté entre animateurs cette menace d'adopter sur l'antenne de Solaris, le "style NRJ" dans la présentation et l'animation : voix uniformes au ton forcé, playlistes raccourcies et imposées, etc... pour reproduire ce que faisaient déjà des radios à Rouen et aux alentours. Pouvait-on craindre à cet instant, comme cela a été tristement le cas dans d'autres régions, que notre station puisse se dévaloriser à son tour en une sorte d' "NRJ bis" à Yvetot, et qu'elle perde ainsi le lien légendaire qui l'unissait à ses auditeurs immédiats et en conséquence son âme de radio libre ?

Pierre > Oui, effectivement. Un jour les programmes ont failli changer car le Conseil d’administration (sans concertation, comme d'habitude - NdW) nous a imposé "ce type" venu du Havre, de « Radio Cap de la Hève » - disparue et reprise par le réseau NRJ justement ! Personne ne le connaissait(1) et il a tenté d'imposer chez nous une programmation "titre par titre". Là j’avoue, j’ai été contre, les programmes devenaient de plus en plus stéréotypés et ressemblaient à une "sous-RVS" (à NRJ plutôt ?). Mais nous les permanents, on n’y était pour rien.

(1) Là ce n'est pas exact car Philippe Lecointre était déjà connu de la direction et des rares membres de l'association France Radio Club encore présents. C'est d'ailleurs lui que l'on aperçoit en 1982 et auquel nous devons la vidéo > "Radio Cap de la Hève chez Radio Solaris" à revoir ici : http://youtu.be/XHfm_JWMOX4       (pour info : Radio Cap de la Hève est devenue un simple relais de NRJ sur le Havre dans le courant de l'année 1984)

JC > Avec le temps, ça fait onze ans que Solaris a disparu, tu regrettes quoi aujourd'hui ?
(en avril 1999)

Pierre > La radio était devenue une véritable entreprise qui ne ressemblait plus du tout à l’association de bénévoles que l'on avait connue au départ en 1981. Hélas si des types comme D... n’avait pas monté le bourrichon à certains et certaines, c'est sûr, on aurait pu continuer.
Se taper presque 14 heures de boulot par jour, ça use un peu, même un passionné de radio et si de plus, on est constamment critiqué, toujours par les mêmes, ou si  les employé(e)s décident eux (elles)-mêmes de modifier leurs horaires de programmes pour pouvoir se lever plus tard...
  (gros soupir ! Rappelons tout de même que Pierre était responsable de la programmation ! NdW)

[ Ahurissante révélation de Pierre : assurer l'antenne dès 6 h 00 le matin semblait une corvée insurmontable pour certain(e)s. Belle solidarité ! Voilà qui ne manquera pas 30 ans après, de faire réagir les jeunes générations sans emploi et ceux qui indirectement déploreront aujourd'hui l'absence de la moindre radio locale à écouter à Yvetot ! ]   NdW


                                       "Les fossoyeurs de Solaris
                                         ne sont pas ceux
                                         que l’on croie..."



JC > Pour terminer, peux-tu nous dire quelques mots à propos d’
Yvetot FM, la radio temporaire qui vient de cesser d'émettre depuis la Médiathèque après quinze jours d'existence, du 27 février au 14 mars 1999 ? En même temps, as-tu écouté les émissions et y as-tu entendu des paroles prononcées qui t'interpellent ?

Pierre > évidemment. Quand j’entends dix ans plus tard sur Yvetot FM, des « animateurs » se gargariser de souvenirs en oubliant de préciser que Solaris a été une bonne pompe à fric pour leurs propres économies (ou doit-on dire "à des fins d'enrichissement personnel" ?) excuse-moi, les fossoyeurs de Solaris ne sont pas ceux que l’on croie.
De plus, à propos du Podium Solaris, il me semble me rappeler que l’on nous avait reproché à François Michaux
(chargé du démarchage publicitaire) et à moi, d’avoir mis sur pied une opération qui coûtait plus cher qu’elle n'allait rapporter, chose que je n’ai pas réentendue évoquer sur Yvetot FM lorsque Daniel Lefebvre (Président de Solaris à l'époque) en a parlé. (...)
Il y a un écart entre une personne qui vient tous les week-ends et n'entend qu'un seul son de cloche et une autre qui y travaille tous les jours. Crois qui tu veux mais moi, je sais ce que j’ai vu et entendu !


JC > Puisque la dernière remarque de Pierre me concerne manifestement, j'affirme une fois de plus
que je ne crois et ne juge personne sur la foi d'une quelconque rumeur (qui n'ont d'ailleurs jamais manqué !).
Dans
le livre "L'histoire d'une Radio libre...", j'ai décrit ce que j'ai vu, entendu et perçu à l'écoute des programmes, comme l'aurait fait n'importe quel auditeur, et tout ce que j'ai vécu en venant à Yvetot, avant de prendre place devant le micro, avec enthousiasme évidemment. Mais je suis d'accord : il y a une différence entre "passe-temps" et "travail". De plus, un bénévole a plutôt tendance à idéaliser sa participation aux actions de son association. 
Pour les faits déroulés hors de ma présence, je ne peux qu'inciter chacun et chacune de l'équipe Solaris à réagir (ou rectifier) les propos rapportés dans ce site et le livre, pour fournir les autres "sons de cloche" de notre aventure, s'ils le veulent
*. Quoique après tant d'années passées... qui ne dit mot consent. Pour cette raison, on ne doit pas être si loin de la vérité.

*
à l'adresse mail du site :  radiosolaris@free.fr

- - - - - - - - - - - - - - -

Conclusion : si les multiples tracas
ont précipité la fin de RADIO SOLARIS en juin 1988 : détournements de fonds, partenariat "pipé" avec Cumulus Fécamp, abus de biens sociaux, litiges avec l'Administration publique, etc... pas de mystère, l
a zizanie non-stop au sein de l'association est sûrement la première cause de disparition de notre radio. 

JC Dumenil  
(p/ le site "radiosolaris.free.fr", membre de l'association Solaris et animateur bénévole)